LISZT Franz (1811-1886) L.A.S. « F. Liszt », Avignon 6 mai 1845, à Joseph AUTRAN…
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LISZT Franz (1811-1886)

L.A.S. « F. Liszt », Avignon 6 mai 1845, à Joseph AUTRAN ; 4 pages in-4 (fentes aux plis réparées au scotch). Importante lettre relative à son projet d'oratorio d'après l'Enfer de Dante sur un poème d'Autran. [Huit jours plus tard, Liszt adressera au poète un exemplaire annoté de La Divine Comédie.] La lettre commence par deux lignes de points témoignant d'une « foule de remerciements indicibles [...] Déjà l'année dernière je vous étais tout acquis ; mais aujourd'hui il me semble qu'il se mêle encore quelque chose de plus sérieux et de plus tendre dans l'amitié que je vous garderai toujours. Mais pour suivre le nouveau précepte de Mr le marquis de Forbin-Janson qui veut qu'on garde de justes termes en toutes choses, passons (non pas outre ou dessus) mais au fait, et ce fait nous conduit droit en Enfer. Je viens de relire le DANTE, et je suis entièrement de votre avis quant au récit impersonnel. Mais en revanche je crois qu'il faudra faire parler personnellement (en choeur et aussi en solos plus brefs) au moins plusieurs catégories de damnés »... Il cite un vers d'Autran : « Nous sommes les flots et les ondes », avec, en écho : « Nous sommes les hérésiarques », et propose, « pour varier, peut-être serait-il bon que dans un cercle ou 2 les esprits invisibles chargés de tourmenter ces pauvres âmes se chargent eux-mêmes d'expliquer au public les crimes des réprouvés ; - quelque pont-neuf littéraire et musical dans ce genre “Malheur à vous, qui passiez vos nuits dans les festins et les orgies (suit l'indication du supplice comme contraste) ; malédiction sur vous” ; etc. etc. »... Il développe cette idée de répétition en rappelant un exemple dans la Lucrèce Borgia de Victor HUGO, repris dans l'opéra Lucrezia Borgia : « “Je suis Maffei Orsini, dont vous avez assassiné... (je ne sais plus quel parent et à quel degré)... Je suis un tel, puis un tel”. Cette situation a fourni l'étoffe d'un excellent final à DONIZETTI, et dans notre oeuvre cette forme sera toute naturelle et plus saisissante qu'aucune autre. Relisez donc la fin du premier acte de Lucrèce Borgia et si vous le trouvez bon servez-vous-en. Il y aura matière à un choeur très piquant des prodigues et des avares attachés ensemble et se choquant les uns contre les autres et se maudissant mutuellement... Presqu'à tous les cercles, le cadre me paraît excellent - à vous à le remplir. Bien entendu qu'il faut garder et faire chanter les vers suprêmes : “Per me si va nella città dolente “Per me si va nell'eterno dolore ; ”Lasciate ogni speranza, etc. et puis ceux-ci encore “Nessun maggior dolor “Che ricordarsi del tempo felice “Nella miseria - En général ne craignez pas non plus de dessiner épiquement les principales figures ; ne reculez même pas devant Homère et Alexandre au besoin... Je tâcherai bien de les barbouiller de couleur du mieux que je pourrai. - Pardonnez-moi, cher ami, de vous parler ainsi à tort et à travers d'une oeuvre aussi sérieuse. Il y a un proverbe français je crois qui dit “Bête comme un musicien”. Je me consolerai parfaitement de ma bêtise à la condition d'être un véritable musicien, et de vous faire un bel enfer »...

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